Appel à communication : Les sociétés de l’Antiquité tardive face à la mort

Article publié le 17 novembre 2020 | Catégorie(s) : Actualités de la recherche, Événements

Colloque international

Aix-Marseille (France) – 4-5 novembre 2021

LES SOCIÉTÉS DE L’ANTIQUITÉ TARDIVE FACE A LA MORT

Nouvelles méthodes, nouvelles questions ?

 

La transformation considérable des méthodologies déployées sur le terrain et en laboratoire a permis un renouveau des questionnements sur les populations et les pratiques funéraires de l’Antiquité tardive. Outre les travaux sur la période tardive et la place qu’y tiennent les pratiques funéraires (par exemple Boissavit-Camus et al. 1996 ; Boyer 2019 ; Cartron et al. 2016 ; Chavarría-Arnau 2007 ; Granier 2017 ; Guyon 2005 ; Heijmans 2004 ; Lambert 2013 ; Nissen-Jaubert 2007 ; Rebillard et al. 2009), l’apparition de ce qui est alors appelé l’Anthropologie de terrain (Duday 2005) est décisive pour le renouvellement des problématiques d’étude. Les recherches récentes, grâce à la multiplication des exemples archéologiques, montrent une volonté de réexamen et de révision des données, tant anthropologiques qu’archéologiques et historiques (Barbiera 2012 ; Boyer et al. 2014 ; Buchet 1996 ; Castex et al. 2015 ; Chavarría-Arnau A., 2019 ; Kacki et al. 2017 ; Laubry 2016 ; Lauwers et al. 2016). Elles accroissent nos connaissances sur le traitement des défunts, la place de la mort parmi les vivants, l’emplacement des aires funéraires, ou encore la structure des sépultures ; tous ces éléments étant variables selon les régions et les cultures.

Ces nouveaux travaux, désormais préférentiellement pluridisciplinaires, permettent de questionner des vérités anciennes et de relancer la réflexion sur la manière dont ces sociétés antiques envisageaient la Mort et géraient leurs morts dans le contexte de changements multiples survenus au sein de l’Empire et sur ses marges.

L’Antiquité tardive se distingue en effet pour ses évolutions politiques, sociales, économiques et culturelles. Cette période de changements sociétaux profonds voit d’abord coexister les institutions romaines et de nouvelles structures sociales, notamment celles issues de la religion chrétienne naissante. Les sociétés de l’Antiquité tardive révèlent ainsi une mosaïque d’entités politiques, sociales et culturelles, tant au cœur des provinces de l’Empire que sur leurs régions limitrophes.

Cette pluralité de situations s’exprime-t-elle pour autant également dans les pratiques funéraires ? Quels sont les éléments qui permettent d’identifier et définir cette diversité ?  Et dans quelles mesure peut-on véritablement appréhender les conditions de vie des communautés anciennes et leurs potentielles transformations à partir des pratiques funéraires ? Entre les premiers siècles de l’Empire Romain et la période tardive, quel degré de continuité ou de changement des dynamiques populationnelles et culturelles ces pratiques révèlent-elles ?

Une réflexion spécifique sur le monde des morts à grande échelle géographique et thématique et dans toute sa pluralité disciplinaire, s’impose donc désormais. L’anthropologie et ses sciences corrélées (biologie, archéo-thanatologie, biochimie) sont appelées à y trouver une place privilégiée, associées aux démarches archéologiques, historiques, environnementales et sociétales. C’est à l’examen de cet ensemble de questions que seront consacrées les deux journées pour lesquelles nous diffusons cet appel à communication.

 

Les thèmes de recherches abordés dans les propositions peuvent alors être aussi divers que :

 

Rapport entre occupation des sols et le droit foncier et installation des aires funéraires 

L’accès à l’occupation des sols et le droit foncier, en particulier en contexte urbain, connaissent une évolution concomitante à l’installation de nouvelles aires funéraires. La pratique entraîne-t-elle une modification du droit ou l’évolution du droit (induite par le changement de la trame urbaine) permet-elle de nouvelles pratiques ? Ces questions appellent un regard croisé entre l’approche archéo-anthropologique et l’étude des textes, portant par exemple sur l’évolution du statut des parcelles ou l’accès des morts à certaines zones.

 

Expression de l’identité sociale dans la mort

Qu’en est-il du maintien de l’identité de l’individu dans la mort au sein des communautés tardives ? Il s’agit de comprendre ce que les choix observés traduisent des croyances sociales, culturelles ou religieuses des diverses communautés. La marque sur la tombe ou au contraire l’absence de marque peut-elle nous renseigner sur la place que prennent les individus dans la société ou sur leurs croyances ?

 

Pluralité de cultures et de communauté dans la perception de la mort, du corps et de de la sépulture

L’évolution des pensées et leur pluralité induisent des concepts liés à la mort parfois très divers. Cette pluralité est présente durant les premiers siècles de la période romaine, car induite par la multitude des communautés, qui ont chacune leurs pratiques propres, héritées d’une longue histoire. Face aux changements du cadre socio-culturel de la période tardive, comment se transforment les notions de corps, de mort, de sépultures (en tant que structure) ou d’aires funéraires (emplacement, topographie) ? Comment ces transformations se traduisent dans les pratiques funéraires ?

 

Réorganisation de L’Empire et pratiques funéraires

La période tardive connaît des changements importants, tant politiques que territoriaux. L’évolution de la gestion politique et administrative de l’Empire, la modification de la trame urbaine de nombreuses villes, ou la réorganisation du foncier dans les campagnes ont-t-elles entrainé des transformations ou des mutations au sein des pratiques funéraires ? Ou au contraire assiste-t-on à une forme de continuité dans les gestes adoptés ?

Au-delà du cadre conceptuel, des transformations très concrètes s’opèrent d’un point de vue économique, culturel, politique ou social. Ces changements influencent-ils également les pratiques funéraires ?

 

Relations entre les catégories de la population dans l’expression des pratiques funéraires

A l’échelle large de l’Empire et de ses voisins, mais aussi à l’échelle plus réduite du groupe (cité, ville, communauté), les relations entre les différentes catégories de la population peuvent modifier les pratiques adoptées par chacun. Certaines catégories de la population en influencent-elles d’autres dans l’exercice et l’expression des pratiques funéraires ? Si oui, lesquelles et comment ?

 

Les populations : constitutions, évolution, pluralités

Les échanges de populations sont présents dès le début de l’Empire, voire avant. Les routes commerciales entraînent logiquement des mouvements d’individus, qui font évoluer les constitutions des groupes humains au cours du temps. Comment se caractérisent les communautés et comment évoluent-elles ? Quels sont les pratiques et les croyances funéraires des populations dans et aux marges des territoires de la partie occidentale de l’Empire Romain ? Des évènements particuliers peuvent également affecter la constitution des groupes de populations : il s’agit d’évaluer l’impact que peuvent avoir des épisodes de mortalité massive d’ordre sanitaire, belliqueux ou environnemental sur la constitution des groupes humains et sur les pratiques funéraires à court et à long terme. Par exemple, la “peste” antonine survenue au IIe siècle affecte directement la vie économique puis la structuration même de l’Empire durant le IIIe s. Quelles sont les conséquences d’une telle pandémie sur le long terme ?

 

Ces thématiques pourront être abordées sous les angles archéo-anthropologiques, biologiques, historiques, archéologiques, topographiques, sociétaux. Les études pluridisciplinaires sont particulièrement attendues, qu’elles soient synthétiques ou qu’elles portent sur des études de cas.

 

Les langues du colloque sont le Français et l’Anglais.

Les propositions de communication orale ou de poster (en Anglais, ou en Anglais et en Français) devront être soumises avant le 31 janvier 2021 à l’adresse suivante : mortantiquitetardive@gmail.com. Elles devront mentionner le titre de la communication (en anglais ou en anglais et en français) la liste des auteurs, leur rattachement institutionnel et coordonnées respectifs, un résumé (en anglais ou en anglais et en français) de 1800 signes pour les posters ou 3000 signes pour les communications orales, une biographie des auteurs (en anglais ou en anglais et en français) de 1000 signes.

 

Les communications orales seront de 15 mn suivies de 10-15 mn de discussion. Nous demandons que le support powerpoint de la communication soit rédigé en anglais, même si celle-ci est effectuée en français. Les posters seront en anglais.

 

Comité d’organisation

Gaëlle Granier (Archéo-anthropologue, Chargée de recherche CNRS, UMR 7268 ADES), Charlotte Boyer (Doctorante en archéo-anthropologie, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, UMR 7041 ArScan – UMR 7206 EAE), Elisabeth Anstett (Anthropologue, Directrice de Recherche CNRS, UMR 7268 ADES).

 

Keynote speakers

Alexandra Chavarria-Arnau (Università degli Studi di Padova, Padoue)

Eric Rebillard (Cornell University, New York)

 

Comité scientifique

Llorenç Alapont-Martin (Université de Valence, Espagne), Elisabeth Anstett (UMR 7268 ADES, Aix-Marseille Université, Marseille), Reine-Marie BÉrard (UMR 7299 CCJ, Aix-Marseille Université, Aix-en-Provence), Brigitte Boissavit-Camus (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, UMR 7041 ArScan, Paris), Charlotte Boyer (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, UMR 7041 ArScan – UMR 7206 EAE, Paris), Isabelle Cartron (Université de Bordeaux, UMR 5607 Ausonius, Bordeaux), Dominique Castex (UMR 5199 PACEA, Université de Bordeaux, Bordeaux), Olivier De Cazanove (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, UMR 7041 ArScan, Paris), Alexandra Chavarria-Arnau (Università degli Studi di Padova, Padoue), Gaëlle Granier (UMR 7268 ADES, Aix-Marseille Université, Marseille), Sacha Kacki (UMR 5199 PACEA, Université de Bordeaux, Bordeaux), Chiara Maria Lambert (Università degli Studi di Salerno, Salerne), Nicolas Laubry (Ecole Française de Rome, Rome), Michel Lauwers (UMR 7264 CEPAM, Université de Nice-Sophia-Antipolis, Nice), Anne Nissen (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, UMR 7041 ArScan, Paris), Eric Rebillard (Cornell University, New York), Pascal Sellier (UMR 7206 EAE, Musée de l’Homme, Paris).

 

Références

Barbiera I., 2012. Memorie Sepolte : tombe e identità nell’alto Medioevo (secoli V-VIII). Roma, Carrocci Editore, 275 p.

 

Boissavit-Camus B., Zadora-Rio E., 1996. « L’organisation spatiale des lieux d’inhumation : état des questions », in Galinié H., Zadora-Rio E. (dir.), Vie et mort du cimetière chrétien. Actes du colloque Orléans 29 septembre – 1er octobre 1994, Tours, La Simarre, p. 49-53.

 

Boyer C., 2019. Life and death in Late Antiquity Calabria (Italy): the case of the 4th-6th century community from Scolacium. 21st Annual Conference of the British Association for Biological Anthropology and Osteoarchaeology, London, september 13th-15th 2019.

 

Boyer C. Villa C, Primeau C., Svendsen I., Arge S. O., Jørkov M.L., 2014. A challenging diagnosis. European Meeting of the Paleopathology Association, Lund (Sweden), august 2014.

 

Buchet L., 1996. Les habitants de la Gaule du Ier au VIIIe siècle. Apports de l’Anthropologie physique. Mémoire pour l’Habilitation à Diriger les Recherches, Université Paris I, 4 volumes, 569 p (Inédit).

 

Cartron I., Castex D., 2016. « L’archéologie face à la restitution des funérailles et à la mémoire de la tombe : à propos de quelques cas aquitains du haut Moyen-âge », in : Lauwers M., Zemour A. (dir.), Qu’est-ce qu’une sépulture ? Humanités et systèmes funéraires de la Préhistoire à nos jours, Actes du colloque des Rencontres d’Antibes, Antibes, p. 399-412.

 

Castex D., Kacki S., 2015. « L’impact des épidémies sur les usages funéraires du passé. Faits archéologiques versus idées reçues », in : Treffort C. (dir.), Le cimetière au village dans l’Europe médiévale et moderne, Actes des XXXVe journées internationales d’histoire de Flaran, Presse Universitaire du Midi, Toulouse, p. 233-251.

 

Chavarría-Arnau A., 2007. “Splendida sepulcra ut posteri audiant. Aristocrazie, mausolei e chiese funerarie nelle campagne tardoantiche”. in : Brogiolo G.P.,  Chavarría-Arnau A.,  Archeologia e società tra Tardo Antico e Alto Medioevo. Mantova, Documenti di Archeologia, 44, p. 127-146.

 

Chavarría-Arnau A., 2019. “The Topography of Early Medieval Burials : some reflections on the Archaeological Evidence from Northern Italy (Fifth-Eight Centuries)”. In : Escalona J., Vésteisson O., Brookes S. (eds.), Polity and Neighbourhood in Early Medieval Europe, Turnhout: Brepols, p. 83-120.

 

Duday H., 2005. « L’archéothanatologie ou l’archéologie de la mort ». In : O. Dutour, J.J. Hublin, B. Vandermeersch (dir.), Objets et méthodes en paléoanthropologie, Comité des travaux historiques et scientifiques, Orientations et méthodes n° 7, Paris, p. 153-217.

 

Granier G., 2017. « Evolution de la conception de la mort et de la gestion des morts dans l’espace urbain et péri-urbain durant l’Antiquité : l’exemple des nécropoles tardives de Vienne et Arles ». in : De Larminat (S.), Corbineau (R.), Corrochano (A.), Gleize (Y.), Soulat (J.) (dir.) : Rencontre autour de nouvelles approches de l’archéologie funéraire. Actes de la 6e Rencontre du Groupe d’anthropologie et d’archéologie funéraire, 4-5 avril 2014, INHA, Paris, Publications du GAAF, 6, p. 285-290.

 

Granier G., 2011. Approche archéo-anthropologique des ensembles funéraires de l’Antiquité Tardive. L’exemple des sites urbains de Vienne et Arles (IIIe-VIe siècles), Thèse de Doctorat en Anthropologie biologique, Aix-Marseille Université, 469 p.

 

Guyon J., 2005. Des rites funéraires chrétiens ? In : M.P.  Rothé, H. Tréziny (Dir.) : Carte Archéologique de la Gaule 13/3 : Marseille et ses alentours, Fondation Maison des Sciences de l’Homme, Paris, p. 225-229.

 

Heijmans M., 2004. Arles durant l’Antiquité tardive. De la Duplex Arelas à l’Urbs Genesii. Ecole française de Rome, Rome, 448 p.

 

Kacki S., Zitelli F., Blanchard P., Chapoulie R., Castex D, 2017. Dynamique de constitution des sépultures plurielles de la catacombe des Saints Pierre-et-Marcellin (Rome) : apport des analyses physico-chimiques. 6e Rencontre du Groupe d’anthropologie et d’archéologie funéraire, Apr 2014, Paris, p. 205-209.

 

Lambert C.M., 2013. “Episcopus, civitas, territorium nella documentazione epigrafica della Campania tardoantica”. in : Atti del XV Congreso Internacional de Arqueología Cristiana (XV CIAC). Città del Vaticano Casa ed. Vaticano, p. 1523-1540.

 

Laubry N., 2016. “Les espaces funéraires des collèges dans l’Italie romaine.” in : Rodríguez-Gutiérrez O., Tran N., Soler Huertas B.  (éd.), Los espacios de reunión de las asociaciones romanas. Diálogos desde la arqueología y la historia, en homenaje a Bertrand Goffaux, Séville (Colleción Historia y Geografía, 325), p. 115-135.

 

Lauwers M., Zemour A., 2016. Qu’est-ce qu’une sépulture ? Humanités et systèmes funéraires de la préhistoire à nos jours, XXXVIe Rencontres Internationales d’archéologie et d’histoire d’Antibes, 13-15 octobre 2015. APDCA, 495 p.

 

Nissen-Jaubert A., 2007. Migrations et invasions de l’Antiquité tardive à la fin du premier millénaire : affichages identitaires, intégration et transformations sociales. Archéopages, Migrations 18 : 26-30.

 

Rebillard E, Rawlings E, Routier-Pucci J, 2009. The Care of the Dead in Late Antiquity. Cornell University Press, 240 p

 

 

Dates : Du jeudi 04 novembre 2021 au vendredi 05 novembre 2021

Lieu : Maison Méditerranéenne des Sciences de l'Homme, Aix-en-Provence

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